La lanterne d'Aristote

Thierry Laget

Gallimard

  • Conseillé par
    7 novembre 2012

    Alice au pays des livres

    Dès les premières lignes de ce roman, je me suis sentie comme l'héroïne de Lewis Caroll quand elle tombe au fond du terrier. Devant elle comme devant moi se trouvait la porte d'un monde imaginaire et j'éprouvais comme Alice les plus grandes difficultés pour trouver la clé qui me permettrait d'ouvrir la dite porte. L'univers romanesque de Thierry Laget me résistait... L'intrigue, une comtesse recrute un millionnaire désoeuvré pour "ordonner", "cataloguer" la bibliothèque constituée par ses ancêtres, ne me semblait pas des plus palpitantes. Le cadre, un vieux château avec tableaux anciens, meubles qui feraient le bonheur d'antiquaires, sous-terrains mystérieux et étrange lumière la nuit en haut d'une tour paraissait tout droit sorti d'un roman fantastique anglais. J'avais encore trop en tête l'excellent roman de Sarah Waters "L'indésirable" et son château maléfique pour apprécier à sa juste valeur celui de Thierry Laget.


    Mais comme Alice, je suis obstinée et je me suis donnée comme obligation avant d'abandonner la lecture de ce livre de trouver l'explication du titre mystérieux : La lanterne d'Aristote. Très vite, ce défi n'est plus devenu nécessaire, je me suis laissée prendre par la magie des phrases. Ce livre est merveilleusement écrit, avec un souci du mot juste et du rythme de la phrase. La langue est ici comme un grand cru que l'on savoure, gorgée après gorgée. Les personnages de ce roman passent en arrière-plan et laissent le devant de la scène à leurs illustres prédécesseurs qui vivent entre les pages des livres de la bibliothèque.
    Ce roman est un hymne à la langue, au roman, à l'imaginaire. Il résiste pour mieux séduire et laissera une empreinte indélébile dans le coeur d'une Alice émerveillée par son court séjour au pays des livres.


  • Conseillé par
    21 octobre 2011

    Un enchantement !

    Azélie, une comtesse en jean rentré dans ses bottes et à chemise à carreaux, fumant des cigarillos charge un homme (inconnu ?) de cataloguer l'immense et insondable bibliothèque de son château. La bibliothèque date du XVème siècle et compte vingt mille volumes, des manuscrits, des incunables, de belles reliures inestimables. "Si nous nous entendons, si la solitude ne vous effraie pas, vous y demeurerez tant qu'il vous plaira, on vous dérangera aussi peu que possible et je vous présenterai de vieux sages qui vous tiendront silencieusement compagnie. Les soirs où vous aurez envie de vraie société, je serai là et nous bavarderons. Réfléchissez. Mais, si vous vous décidez, ne venez pas avant le printemps." propose la comtesse. L'homme c'est le narrateur dont on sait peu de choses. Il est cultivé, grand lecteur, riche et a fait plusieurs fois le tour du monde. C'est à peu près tout. Ni un rat des villes, ni un rat des champs, un rat des livres. Le château fait aussi fonction de chambres d'hôtes. Une jeune étudiante le fait visiter aux touristes. Il y a également un homme à tout faire (un factoton qui effectivement sait tout faire sauf lire !), une cuisinière et des gens de passage, parfois curieux ou intrigants. Notre énigmatique narrateur va "hanter" le château jours et nuits, "traverser les apparences". Un bien étrange visiteur. Je ne devrais pas vous en dire plus...ce roman est une surprise. Ce livre est un enchantement à lire. Le style de Thierry Laget ravive Walter Scott et Giraudoux, Conan Doyle et Aristote. C'est parfois drôle, souvent érudit sans jamais être pédant, exigeant mais jamais facile. C'est encore un bel hommage à la littérature, cette "immense vibration du monde." " Celui que vous appelez le Lecteur lit pour que nous continuions d'exister ; s'il referme le livre, nous ne sommes plus. " Je conseille vivement ce roman que j'ai eu du mal à lâcher...